samedi 3 avril 2010

Alcibiade, Jacqueline de Romilly.

Quel destin exceptionnel que celui d’Alcibiade. Je connaissais très vaguement son histoire de traître. Et j’ai découvert un Paganini de la volte face, un virtuose du retournement de veste, qui fait passer nos Sarkozy, Kouchner ou autres Besson pour de gentils amateurs.

L’époque à laquelle vit Alcibiade est une des périodes les plus passionnantes et les plus documentées de l’antiquité. C’est celle de l’apogée puis du déclin de l’empire Athénien. Alcibiade va tour à tour servir puis trahir les trois puissances de la région : Athènes, Sparte et la Perse.

Sa patrie, c’est Athènes. Il va la mener à la catastrophe à cause de la folle ambition qui l’anime : devenir Alcibiade le Grand, un siècle avant Alexandre. Parti pour conquérir la Sicile à la tête d’une invincible armada, il va être la victime d’un complot ourdi par ses adversaires athéniens, qui voient en lui un futur tyran, s’il revient triomphant de sa campagne militaire. Alcibiade, trahi par les siens, va choisir de trahir les siens : il se range du côté de Sparte. Il va ainsi devenir un conseiller politique et militaire déterminant dans la guerre du Péloponnèse, permettant à Sparte de prendre l’avantage sur Athènes.
Il va ensuite proposer sa médiation auprès du roi de Perse, pour tenter de le convaincre d’un rapprochement avec Sparte. Là encore, son éloignement de Sparte va réveiller ses adversaires lacédémoniens. Se sentant menacé, Alcibiade va trahir à nouveau pour devenir conseiller du satrape perse Tissapherne. On pense alors qu’ayant fait le tour de toutes les puissances à trahir, notre héros prendra une heureuse retraite. Pas vraiment …
Alcibiade va alors réussir le plus extraordinaire, le plus magnifique, le plus impensable retournement de situation : revenir à Athènes acclamé en héros.

Jacqueline de Romilly nous livre un magnifique thriller. Tous les ingrédients sont là pour nous tenir en haleine. On tourne les pages fébrilement, surpris par des rebondissements inattendus, conquis par un personnage attachant malgré ses turpitudes.
On trouve aussi matière à réflexion sur la motivation des hommes politiques :
« Le goût du faste, qui est étroitement lié à celui du pouvoir, lui [Alcibiade] fait dépenser de l’argent pour des gloires sportives, qui, effectivement, attirèrent les yeux de tous. Mais les achats faits à cette occasion furent financièrement suspects et entraînèrent des procès, qui traînèrent longtemps. Ce sont choses qui arrivent quand l’ambition, liée à l’audace, ignore les limites et les scrupules. Mais ce sont des choses, aussi, qui ne témoignent pas d’un bon état de la démocratie. ».
A méditer …

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