dimanche 29 mars 2009

Spectacle d'une agonie.



Paul Veyne, dans "Sexe et pouvoir à Rome", explique que l'attrait principal pour les combats de gladiateurs ne résidait pas dans la lutte à mort entre deux hommes. Le plus souvent, le combat se terminait par l'abandon d'un des deux adversaires. C'est alors que le mécène du spectacle prenait la décision soit d'épargner le vaincu, soit de le mettre à mort. Le clou du spectacle était ce moment:
"Un combat de gladiateurs n'est pas un duel loyal où décident les armes: sa logique est d'acculer un malheureux à se déclarer lui-même brisé et à remettre son existence aux mains d'un public qui sent sa toute-puissance dans cet instant où un homme attend sa sentence. La chose passionnante à voir est le visage de cet homme qui attend, puis le visage qu'a cet homme pendant qu'on l'égorge: précisément, l'honneur professionnel des gladiateurs était de demeurer impavides pendant ces instants, qui étaient les moments inoubliables du combat: tout ce qui avait précédé ne tendait qu'à cela."

Le parallèle est saisissant, à deux mille ans de distance, avec le spectacle organisé autour de la mort de Jade Goody. Bien sûr, sa mise à mort n'a pas été décidée par un quelconque organisateur de spectacle (peut-être y reviendra-t-on ...), mais l'engouement suscité par cette agonie a sans doute beaucoup à voir avec un instinct archaïque, vouloir percer derrière le visage d'un condamné à mort le secret qui nous terrifie et nous concerne tous, à plus ou moins longue échéance.

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