vendredi 17 août 2007

Mode du moyen âge.



Hier, invité à boire un apéritif avant le dîner, j'ai goûté de l'hypocras, une sorte de vin sucré aux relents de Synthol. Après m'être massé la nuque avec le fond du verre, je me suis penché sur l'étiquette de la bouteille: "apéritif à la mode au Moyen Âge".
Je connaissais la peste, la guerre de cent ans et le servage entre autres "modes" caractéristiques de cette époque, mais j'ignorais jusqu'ici que les croquants, après leur dure journée de labeur aux champs, se réunissaient autour de cacahuètes pour boire l'apéro local. Je les imaginerai dorénavant s'ouvrant l'appétit, s'encourageant mutuellement, afin de se donner de l'allant avant de passer à table, pour se régaler d'un bon fricot de légumes et de racines cuit et recuit.

mardi 14 août 2007

L'étranger, Albert Camus



Hier matin, en me promenant sur une braderie, je suis passé devant le stand d'une lycéenne qui se débarrassait de son stock de lectures obligatoires de l'année. Entre autres pépites se trouvait l'étranger, que je me suis empressé d'acheter pour le quart de la moitié du prix d'un Spirou. J'avais l'intention hier soir d'en relire quelques passages avant de dormir, pour me réchauffer au soleil d'Alger, histoire d'oublier ces pluies d'été qui n'en finissent pas d'annoncer l'automne.
Pages après pages, j'ai oublié le temps, happé par la confession de Meursault, et c'est tard dans la nuit que j'en ai fini la lecture. Écrit il y a plus de soixante ans, le livre n'a rien perdu de sa force, il continue d'étonner par cet équilibre entre simplicité de la prose et profondeur de la réflexion. Ce qui rend ce livre toujours aussi moderne, c'est que les questions soulevées ne seront jamais résolues, toute société humaine impliquant un choix entre conformisme et liberté d'action, et les réponses ne peuvent être apportées qu'au niveau individuel.

dimanche 12 août 2007

Stanley Milgram,La Soumission à l'autorité



Je connaissais bien sûr la célèbre expérience qui conduit M Toutlemonde à se comporter en tortionnaire. Ce livre m'a pourtant surpris: son sujet n'est pas la simple description des différents protocoles que Milgram a mis au point. A partir des résultats incroyables qu'il a observé, Milgram ouvre une réflexion d'une profondeur remarquable sur le processus de perte de conscience morale dès lors que l'homme se trouve en situation de maillon d'une organisation dont il respecte l'autorité. Sa théorie sur le passage à l'état agentique pour expliquer des agissements qui seraient condamnés théoriquement par ceux-mêmes qui les commettent est une réponse convaincante à la question des crimes de guerre et autres joyeusetés dont se rendent coupables de bons pères de familles dans certaines conditions. Sans angélisme, l'auteur explique que la soumission indispensable à une organisation protectrice et efficace s'accompagne d'une perte d'autonomie de la conscience, que le gain en terme de sécurité peut se payer d'un abandon de sa capacité à distinguer le bien et le mal.
Milgram a écrit un des plus grands livres du vingtième siècle sur la relation de l'homme à la société dans laquelle il vit. On ne peut s'empêcher de traquer le Eichman qui sommeille en chacun de nous après cette lecture.

mercredi 1 août 2007

La ballade de l'impossible, Haruki Murakami.



Il y pleut à verse dans ce livre. On y boit des alcools forts en grande variété et quantité, on y écoute de la musique anglo saxonne des années soixante, et on y lit du Fitzgerald, du Faulkner, du Thomas Mann. Tout cela ne ressemble pas à ce qu'on attend d'un romancier japonais.

Watanabe, le héros du livre, nous raconte, vingt ans après, sa sortie de l'adolescence, son entrée dans l'âge adulte, de ses dix sept ans à ses vingt ans. C'est un air des Beatles entendu dans un aéroport qui fait resurgir ses souvenirs de jeunesse. L'auteur nous emmene à la rencontre de personnages extraordinaires, nous exposant avec lucidité et sincérité la part d'hombre que chacun porte en soi. L'atmosphère du livre est envoutante, tout contribue à nous plonger dans une ambiance de fin de soirée entre amis, quand s'échangent des idées vagues et essentielles sur la vie, la mort et l'amour.
Murakami a trouvé un ton personnel entre réalisme et fantastique qui donne à l'ensemble un équilibre rare entre humour, émotion et poèsie. Ainsi, une maison de repos où on cultive de magnifiques légumes, où on ne distingue pas les patients du personnel soignant, finit par aparaître de manière étrange comme la réplique miniature de notre monde. Des situations les plus banales, l'auteur en fait ressortir à petites touches les dissonances, puis les amplifie jusqu'à nous transporter très loin dans les profondeurs de l'âme humaine, mais toujours avec une subtile dose d'ironie.